Tu galopes, guidée par la lumière de la lune. Tu galopes, tes doigts effleurent les tiges de maïs qui te dépassent de quelques centimètres. Tu n'as ni lampe, ni téléphone portable. Tu n'es pas certaine d'être au bon endroit, pendant un instant la peur t'envahit. Et si c'était un genre de test macabre ?
Mais tu te ressaisis lorsque des rires interrompent le silence. Tu t'arrêtes, tu écoutes. Des pas, des souffles, tu t'imagines des sourires qui brillent comme des soleils.
Ce soir le centre a prévu une soirée pour halloween, ce soir tu sors de ton trou, tu vas t'amuser ou au moins essayer.

Halloween. Ce mot raisonne dans ta tête. Tonne, tourbillonne. Il devient synonyme de liberté. Oublié les fantômes et les monstres. Ce soir c'est la fête. Tu n'as pas le cœur à ça mais tu y va. Tu sais que les moments comme ceux-là son rare. Tu veux en profiter. Tu prends donc ton envole et tu cours dans ces champs de maïs. Tu ne fais qu'imiter les ombres autour de toi. Tu ne peux t’empêcher de penser qu'en fait t'es pas libre. Pas plus que d'habitude. Tout ça n'est qu'illusion. Peut-être même une hallucination. Mais t'en profites. Il y a que ça à faire de toute façon. Pendant un instant tu penses même à t'enfuir. Fuir ces ombres, fuir ce monde. Pourtant tu restes tu continue à courir pour rejoindre les autres.
T'es subjugué par ce ciel étoilé. T'as la tête qui tourne un peu à force d'avoir les yeux rivés sur les étoiles. T'as même l'impression d'avoir bousculé quelqu'un. Mais tu t'en fou pour le moment. L'important c'est le spectacle qui se déroule sous tes yeux. Ce beau spectacle.  C'est que des étoiles pourtant. Mais c'est tellement beau.

Tu continues d'avancer. T'as encore les yeux levés au ciel. Pendant un instant tu te dis que personne ne pourra gâcher ça. Et là t'entends quelqu'un crier. C'est pas un appel à l'aide. Tu te sens viser. Tu quittes les étoiles et tu te retournes vers elle. Vers la réalité. Elle te regardes pas comme les autres. C'est comme si elle t'en voulait. Tu cherches, tu cherches. Tu te demandes pourquoi elle est par terre. Et là tu vois en train de courir comme un idiot. Tu te vois la bousculer. Puis tomber comme une feuille. Comme une plume. Sauf qu'elle est pas douce la plume. Et elle te regardes pas comme les autres. Toi t'as pas l'habitude de ce genre de regards même si tu les préfères. Donc elle t'intrigue et tu l’observes. Tu sais pas trop quoi dire non plus. T'es comme un gamin pris la main dans le sac. T'as même sûrement l'air d'un demeuré. Donc tu souris. Et tu t'approches aussi. Tu lui tends même ta main. Désolé. Et là tu trouves qu'elle est jolie. Et qu'elle pourrait l'être encore plus si elle souriait.

Elle l’attrape ta main. Toi ça t'arranges. T'auras pas l'air d'un con. Et ce n'est pas si désagréable. Sa peau est même plutôt douce. Puis elle te demande pourquoi. Pourquoi tu courrais ? Oui, pourquoi ? À quoi ça t’avançait. C'est même pas la liberté. Mais c'était un peu pareil. C'était beau. T'étais heureux. Ou du moins ça s'en approchait. Mais tu l'as croisais. Alors pour une fois tu sais plus quoi dire. Ça te ressemble pas pourtant. Tu sais pas ce qui t’arrive. Donc tu te contente de hausser les épaules. Dans sa tête ça doit déjà clignoter demeuré, demeuré, demeuré. Alors tu te dit que ce serait plus simple de partir maintenant. Ce serait mieux pour toi. Mais tu restes. Tu restes planté là. Je t'ai fait mal ? Peut-être que c'était écrit comme ça. Que ce n'était pas les étoiles qui devait te faire sourire mais elle. Peut-être que tu divagues complètement. Oui c'est ça. Tu divagues simplement.