Un coup... J'ai le cœur qui bat.
Qui résonne entre quatre murs.

Deux coups... J'ai le souffle court.
Qui percutent mes tympans, les brisent.

Trois coups...  Je les entends.
Qui me font perdre la tête.

La porte s'ouvre, ils entrent, ils parlent puis se retirent.
Je n'ai pas dit un mot, ni avant, ni pendant, ni même après.
Je les hais, eux, cela même qui m'ont donné naissance.

Je n'écoute jamais ce qu'on me dit,
mais j'entend tout ce que je maudis.
Mon prénom, mon nom, mon âge, mes loisirs, toute ma vie.
Il n'ont de cesse de les ressasser ces abrutis !

Je ne voulais pas l'écouter mais... Il ne m'a pas laissé le choix.
- Mon fils,
Là je voudrais juste l'arrêter mais... Je sais que je ne rentrerais pas chez moi.
- moi et ta mère...
Je retiens juste un rire mais... Son regard me met aux abois.
- nous avons décidé que cet endroit pourrait t'aider.
Je n'ai rien dis, je ne dis rien, je ne dirais plus jamais rien. Et me voilà à suivre le convoi.

On dit souvent que la naissance est le plus beau moment de notre existence. Je me demande pourtant toujours pourquoi alors, on démarre nos premiers instants en versant tant de larmes. Ce n'est pas des rires mais des cris qui résonnent dans nos chambres d'hôpitaux. Et les jours s'écoulent, les vagues se succèdent dans les remous des aléas du quotidien. Vous savez, j'ai toujours cru que si j'attendais calmement, un jour, je comprendrais l'essence réelle de ma présence sur Terre. J'en ai passé des heures dans mon ascenseur intérieur à chercher des réponses. A chaque étage j'avais un début qui menait inlassablement à une autre question et sans fin le papyrus se déroulait jusqu'au jour où mon cœur a cessé de battre.

Arythmie, un mot inconnu qui change une vie. J'en ai cherché la définition, pour faire simple c'est un trouble du rythme cardiaque, une maladie rare qui peut éventuellement mener à la mort. Les choses ont commencé à cet instant là, dans ce même hôpital où ma vie avait commencé. Amusant comme les choses se répètent : une chambre d'hôpital, un cœur qui se met à battre, quelque mots du médecin puis les cris et les larmes. J'étais le principal intéressé et le seul à rester calme. C'était ma vie qui venait de s'arrêter, mais pas une larme ne coulait sur mon visage. J'observais simplement tout en réalisant l'ironie de la situation. Mon père pleurait pour les frais du collège privé qui ne pourrait lui être remboursé. Ma mère pleurait pour d'autres raisons encore plus stupides les unes que les autres.


Mais pas un seul d'entre eux n'avait versé la moindre larme pour moi. Je suis peut-être égoïste, mais je voulais un peu d'attention, juste une minute d'affection. C'est pour ça que j'ai fait un pas en avant et que je me suis laissé tomber dans le précipice. Je voulais noyer mes peurs et mon chagrin, me perdre simplement. C'était si simple, si facile de suivre le courant, de m'envoler loin dans des actes aussi tranchants que révoltants. Mais rien à faire, ils ne réagissaient pas, peu importe le vandalisme, la violence. Je détestais les regards qu'ils posaient sur moi, je détestais les messes basses qu'ils échangeaient entre eux quand j'étais là. Puis un soir où j'avais trop bu, je riais, je pleurais, bouteille à la main. Il faisait froid mais le ciel était d'une beauté toute particulière. Mon cœur s'est serré, j'ai chancelé, puis en voulant me rattraper sur la rambarde j'ai trébuché et je suis tombé... Entouré par le néant, j'ai fermé les yeux et j'ai perdu connaissance. Vous l'avez compris, si je suis là aujourd'hui c'est bien parce que j'ai eu une chance folle...

On a pensé que j'avais tenté de me suicider et voilà comment j'en suis venu à être envoyé ici. Catalogué comme un "jeune délinquant suicidaire, souffrant d'une maladie rare qui vraisemblablement déteint sur son mental. " Et mon mutisme n'a rien arrangé à ma situation, cela dit le silence m'est d'un grand réconfort.

Je peux entendre sans écouter, voir sans regarder, toucher avec l'esprit, goûter avec l'âme et sentir du plus profond de mon être. Pour moi c'est ce que j'appelle "communiquer" : un regard, un sourire, parfois un geste. Les mots ? Les mots ne sont que détresses, ils ne sont que tristesses, nous enchaînent et nous blessent. Je n'ai pas besoin d'un mot pour dire "je t'aime". Un silence en dit parfois plus et de la meilleure des façons, un silence ne ment jamais, un silence est sincère, il est puissant, il nous fait vibrer d'émotions.

Je suis comme un prisonnier,
dans le couloir de la mort.
Mais j'ai du bifurquer,
vers un autre sort.

La vie est un don précieux,
pourtant j'aimerais bien voir les cieux.
Y rencontrais les dieux
Et pourquoi pas, vivre un peu mieux ?
J'accepte la mort sans rechigner.

Comme les pages de mon roman, déchiré.
Incapable de ressentir, trop affligé.
Et face au danger, légèrement tiraillé.
Ma vie je suis prêt à te la donner.
Offrir sa vie n'est jamais tout réfléchi.

A toi, à n'importe qui.
Elle m'est sans importance, c'est ainsi.
Mais s'il y avait une personne, une seule.
Je la lui offrirais contre mon linceul.
C'est un échange de bon procédé, non ?

J'ai des regrets. Ils se décomposent au passé comme au présent. Une douce note de nostalgie, une pointe de remord et des lamentations à foison. Qui n'en a pas dans le fond ? Moi j'en ai, plus que de bons moments, de doux souvenirs plein de sentiments, ce sont les maux de dix-sept ans qui me reviennent sans cesse, très profond.

Ma vie n'est que regrets et comme un vieux je me la ressasse sans arrêt.

Une succession de "si", la question du "pourquoi" et de savoir et "si" j'avais été "là"? Comme une chanson pleine de notes, une mélodie très haute pour souligner la chute. Et puis, un dernier mot "zut !"

La peur qui se mue en colère.
Qui charge de folie l'air.
Qui coule durant des heures,
puis frappe comme un boxeur.

Elle ne se contente pas de nous traverser, elle nous pénètre. Elle s'ancre au plus profond de nous, nous perturbe, nous chamboule. La peur, cette émotion qui s'accroche. Une larme qui coule, c'est la peur. Un sourire, la peur n'est jamais loin. Dans la joie, comme dans la peine. Pour le pire comme le meilleur. La peur est notre moitié, elle est né avec nous et elle disparaîtra avec nous.