C’était comme un tremblement de terre, quelque chose qui frappe, qui secoue, qui affole et qui effraie. Elle était là, la peau douce et les yeux verts. Elle était là, elle respirait l’amour mais ses poignets trahissaient sa haine. Ses lèvres ont touchées les miennes plus d’une fois même. Un jour elle est rentrée, elle volait, elle était haut dans les nuages, elle était heureuse. C’est pas souvent qu’on est heureux dans nos quartiers, c’est pas souvent qu’on tombe amoureux dans nos quartiers. Moi j’étais tombé amoureux de Mathilda. Elle m’a dit qu’elle était amoureuse de moi aussi. C’était beau. Simplement. Et puis ce soir là, Mathilda elle est rentrée, mais elle transpirait l’amour d’un autre. Elle savait me dire les choses Mathilda, avec sa peau douce et ses yeux verts. Ses lèvres libéraient des mots qui me faisait du bien, des pansements pour le cœur. Vous connaissez la haine, celle qu’on ne peut pas contrôler, celle qui vous fait peur ? Ce soir là, j’avais cette haine contre Mathilda, avec sa peau douce et ses yeux verts. Alors j’ai frappé Mathilda, aussi fort que j’ai pu, pour que toute ma haine s’en aille. Ça a fonctionné, elle s’est échappée, loin, très loin, elle n’est jamais revenue. Mathilda, elle, elle est restée. Elle ne m’a pas dénoncé, personne n’a su. Et puis un soir, j’suis rentrée, et puis Mathilda elle était là, dans sa voiture, entourée de flic. Mathilda, elle était morte. J’ai cru que c’était de ma faute que c’était à cause de moi que Mathilda était pâle et que ses yeux verts étaient éteints. Alors j’ai tout balancé, j’suis allé dire à un de ces poulets que je l’avais frappée, Mathilda avec sa peau douce et ses yeux verts. Il m’a emmené dans sa voiture.

Quand j’étais assis sur sa chaise, celle qui se balance, avec un dossier en plastique ; il  m’a dit que c’était pas à cause de moi. Elle était juste là au mauvais moment et qu’un mec un peu fou lui avait tiré dessus avant de descendre au enfer lui aussi. Alors, assis sur sa chaise, celle qui se balance, avec un dossier en plastique, j’lui ai dit que c’était l’enfer tout les jours pour moi. Et que Mathilda, celle avec la peau douce et les yeux verts, elle cherchait quelqu’un qui pourrait la rendre heureuse. Il a commencé à me poser des questions, des centaines de questions, des milliers de question. La vitre s’est brisée, en millier de petit bout de verre. Mon cœur aussi. Ma tête aussi.

Ils sont allés chez moi. Ils ont trouvé la cause de mon malheur, ils disent que c’est la drogue. Moi je crois que la cause de mon malheur c’est la vie. Ils m’ont dit que si j’arrêtais de les prendre, j’irais mieux. C’est peut-être vrai. Mais mathilda, elle reviendra pas.

Le visage de Mathilda, il me hante. Dans chaque miroiril apparait, dans chaque reflet je le revois. C'est comme si elle était là Mathilda. Elle me supplie de repenser à elle, je crois qu'elle voudrais que j'arrête de vivre pour la rejoindre, elle voudrait que j'arrête d'avancer oui. Mais tout le monde sait que les morts ne parlent pas.

Non, non, non. Depuis que je suis ici, j'ère. Je survole les questions de la vie sans jamais y répondre. La drogue, ça me donnait l'impression de ne pas voir ces questions. et c'était mieux.

Cette haine, elle est en moi, elle s'en ira pas. Elle a toujours été là, je le sais, je le sent. Elle fait partie de moi, ma violence aussi. Elles sont incrustées dans ma chair.